Leçon 2 : Qui détient le droit d’auteur sur une œuvre?
Généralement, le créateur d’une œuvre littéraire, musicale, artistique ou dramatique sera le premier titulaire du droit d’auteur. Toutefois, il y a certaines exceptions à cette règle. Les scénarios suivants présentent certaines différences dans les règles de propriété, ainsi que des exemples de la façon de transférer le droit d’auteur d’un titulaire à un autre.
Cliquez sur les six scénarios suivants pour afficher les points importants dont il faut tenir compte relativement à la propriété du droit d’auteur.
Scénario 1 : Employé ou entrepreneur indépendant
Votre entreprise est située au Canada et vous voulez engager quelqu’un pour rédiger des dépliants promotionnels. Vous devez décider si vous voulez engager un employé ou un entrepreneur indépendant (un pigiste).
Au Canada, si vous embauchez un employé, à titre d’employeur vous serez le premier titulaire du droit d’auteur, sauf si les deux parties ont conclu un accord pour céder le droit d’auteur à l’employé. En revanche, si vous embauchez un entrepreneur indépendant et que vous le payez pour les services rendus, c’est l’entrepreneur qui sera le titulaire du droit d’auteur, sauf si vous négociez préalablement un accord stipulant que le droit d’auteur vous est cédé. Ainsi, il est important d’examiner la propriété du droit d’auteur avant de conclure un marché de services avec un entrepreneur indépendant.
Le principe selon lequel un employeur détient les droits d’auteur sur les œuvres réalisées par ses employés dans le cadre de leur travail n’est pas appliqué partout dans le monde. Bon nombre de pays ne font pas de distinction pour les œuvres réalisées dans le cadre d’un emploi. Dans ces pays, quel que soit le statut d’emploi de l’auteur/du créateur, ce dernier sera toujours le premier titulaire du droit d’auteur. En tant qu’employeur, vous devez toujours négocier la cession du droit d’auteur avec vos employés si vous voulez avoir le contrôle sur les œuvres créées lors de leur emploi.
Scénario 2 : Collaboration à un projet de livre
Vous et un ami écrivez un livre ensemble. Vous entretenez une excellente relation, mais vous avez une vision différente de ce que vous ferez avec le livre une fois qu’il sera terminé.
Les critères juridiques varient d’un pays à l’autre et permettent de déterminer si vous et votre ami êtes les auteurs/créateurs conjoints de l’œuvre et, par le fait même, les titulaires conjoints du droit d’auteur. Par exemple, au Canada, vous seriez probablement désignés comme les auteurs/créateurs conjoints, car vous aviez tous les deux l’intention d’écrire le livre ensemble; vous seriez donc les titulaires conjoints du droit d’auteur. Vous pouvez conclure un accord de paternité conjointe énonçant vos droits respectifs une fois le livre terminé, en particulier si vous avez des visions différentes de la finalité du livre.
Autrement, l’un de vous pourrait céder ses droits à l’autre personne, de sorte qu’un seul des deux auteurs/créateurs soit le titulaire du droit d’auteur. Cet accord doit être couché sur papier et signé, comme l’exigent la plupart des pays. Une cession peut viser l’ensemble des droits d’auteur ou se limiter à une activité en particulier (par ex., le droit de publier ou de traduire). Vous pouvez également décider si la cession est en vigueur partout dans le monde ou dans une ou des administrations en particulier.
Scénario 3 : Possession d’un tableau
Vous venez d’acheter le tableau d’un peintre local. Vous adorez le tableau et vous voulez le partager avec vos amis. Vous aimeriez le prendre en photo et l’afficher sur votre page Facebook, mais vous vous demandez si vous avez le droit de le faire.
Quand vous achetez un tableau, vous détenez l’objet physique et vous pouvez exercer vos droits de propriété sur l’objet tangible. Vous pouvez détruire le tableau, le prêter à un ami, le ranger dans un placard ou l’afficher. Toutefois, même si vous détenez l’objet physique et que vous pouvez l’afficher, etc., vous ne détenez pas de droit sur l’expression créative qui figure sur la toile. Ainsi, vous ne pouvez pas faire de copie du tableau (que ce soit en le prenant en photo, en le reproduisant ou en permettant à d’autres personnes de le reproduire ou de le photographier), sauf si cela est permis par la loi (comme nous le verrons ci-après) ou si vous obtenez l’autorisation explicite du titulaire du droit d’auteur.
Scénario 4 : Revente d’un tableau
Vous avez décidé de vendre une œuvre d’art moyennant une somme importante, mais vous craignez que l’artiste exige d’être rémunéré pour la revente de son œuvre.
Si vous êtes au Canada, la règle générale veut qu’une fois qu’une œuvre a été mise en vente une première fois par l’artiste, celui-ci ne peut plus exiger de rémunération si l’œuvre est revendue par la suite.
Toutefois, dans certaines administrations, en particulier dans certains pays d’Europe régis par le droit civil, la loi reconnaît le droit de revente des créateurs d’œuvres artistiques, qui ont droit à une redevance chaque fois que leurs œuvres sont revendues.
Scénario 5 : Publication d’un manuscrit à titre posthume
Votre oncle est un auteur célèbre. À son décès, il vous lègue tous ses documents originaux, mais il lègue à votre sœur le droit de publier toutes ses œuvres écrites. Dans ses documents, vous trouvez le manuscrit d’un livre inédit.
Le droit de publier le manuscrit revient à votre sœur, car c’est elle qui détient le droit de publication (le droit d’auteur). Ce point a été soulevé dans le cas de Charles Dickens, le célèbre auteur à l’origine de classiques de la littérature anglaise comme Oliver Twist et Le Conte de deux cités. Dans son testament, Charles Dickens a légué ses documents privés à une partie et ses droits d’auteur à une autre partie. Un manuscrit inédit se trouvait dans ses documents privés. Une poursuite a été engagée pour déterminer qui avait le droit de publier le manuscrit — le propriétaire du document ou le titulaire des droits d’auteur. La cour a déterminé que seul le titulaire des droits d’auteur pouvait autoriser la publication du manuscrit, et ce, même s’il n’avait pas la possession physique du document1. Le propriétaire du document — la manifestation physique de l’œuvre créative de Dickens — n’a pas obtenu le droit de publication de l’expression créative.
1In Re Dickens [1935], Ch 267
Scénario 6 : Achat d’un logiciel
Vous venez de faire l’acquisition d’un logiciel et vous voulez savoir si vous pouvez en faire des copies pour tout le monde au bureau.
Quand vous achetez un logiciel, vous ne devenez pas propriétaire du code informatique (l’œuvre visée par le droit d’auteur). Vous devenez, en fait, titulaire d’une licence d’utilisation du logiciel (c.-à-d. l’utiliser aux fins prévues) et votre utilisation du logiciel est régie par les modalités de cette licence. Certaines lois sur le droit d’auteur vous autorisent à faire une copie d’un logiciel à des fins de sauvegarde ou pour d’autres motifs, mais en général, il est interdit de faire des copies d’un logiciel pour le personnel du bureau — sauf si la licence qui vous a été octroyée par le titulaire du droit d’auteur vous y autorise de manière explicite.